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Le toutou qui enseigna la patience à Chandran

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Traduit de l'anglais par Divyesh Nagarajan, Victoria, Canada

avec l'assistance des moines du monastère hindou de Kauaï, Hawaii


Il faisait chaud en ce jour d'été et Chandran voulait profiter de l'après-midi pour jouer au ballon avec son cousin Abhinav. Une voiture arrivait, en même temps qu'un aboiement sourd se fit entendre de plus en plus fort. Quand la voiture s'arrêta, un petit chien beagle en sauta et courut frétillant vers Chandran. Chandran se mit à le caresser et vit Abhinav courant vers lui. « Assis! Rester ! » dit celui-ci, et aussitôt le beagle s'assit sans plus bouger.


Chandran était surpris. Il n'avait jamais vu un chien aussi obéissant. Il dit : « C’est ton chien, Abhinav ? Comment s'appelle-t-il ? »


« Snoopy—c’est le nom du plus célèbre des beagles, celui des dessins animés Peanuts. Il n'a qu'un an. » Abhinav continuait à caresser le beagle, toujours assis et obéissant.


« Regardes ceci, » dit Abhinav, en faisant signe à Chandran de le suivre. Les deux tournèrent le dos à Snoopy et s'éloignèrent de lui. À une vingtaine de mètres, ils se retournèrent vers lui. Il était un peu malheureux, mais n'avait pas bougé du tout. Abhinav fit signe au chien et lui dit : « Viens ! » Snoopy sauta et se mit à courir vers Abhinav. Lorsqu'il était à environ deux mètres de lui, Abhinav commanda : « Assis ! » et Snoopy s'assit immédiatement. Abhinav vint vers lui, lui tapota la tête et dit: « T’es un bon toutou. » Chandran était épaté.


« Et ce n'est pas tout ! », déclara Abhinav. « Regardes encore ! » Cette fois, Abhinav ne dit rien et se contenta de montrer le sol du doigt et Snoopy s'assit. Puis il tourna sa paume vers le sol, et le chien se coucha. Enfin, Il fit un mouvement circulaire et Snoopy se roula par terre. « Bon toutou », répéta-t-il, et Snoopy se releva.


Chandran demanda : « Comment peux-tu lui faire faire tout cela ? » 


Abhinav haussa les épaules et expliqua : « du temps et de la patience, beaucoup de patience! Mon oncle m'a donné Snoopy, et en même temps un livre sur la formation des chiens. L’oncle expliqua qu'un chien dressé est bien plus agréable; et c'est plus intéressant pour le chien, car il sait ce que vous attendez de lui. Snoopy peut s'asseoir, rester, venir, se retourner, faire le mort, serrer la main et aller chercher. Maintenant, je lui apprends à sauter à travers un cerceau. »


Tout durant le retour chez lui, Chandran ne pensait qu'au petit beagle qui était le tellement bon ami d’Abhinav. Il ne semblait jamais fatiguer, connaissait toutes sortes d'astuces et était toujours prêt à jouer. Combien il voudrait avoir un ami comme ça ! 


Ce soir-là, alors que Chandran s'asseyait pour dîner, il demanda: «Appa, puis-je avoir un chien, s'il te plaît ? » 


Son père hésita une minute et dit: «Je suis d’accord pour te trouver un chien, mon fils. Mais sais-tu qu'une bête implique beaucoup de responsabilités ? »


« Responsabilités ? » demanda Chandran.


« Bien sûr » répondit Appa. « devras le nourrir, le laver, l'emmener en promenade et - surtout - tu dois être gentil et doux avec lui. » 


Chandran sentit l'enthousiasme monter en lui. Les paroles de son père indiquait qu'il était bien disposé à lui trouver un chien.


À la hâte, il promit : « Appa, je ferai tout cela et davantage encore. » 


Les deux étudièrent diverses espèces de chiens et se sont enfin décidés pour un golden retriever, une espèce intelligente qui s’accorde bien avec les enfants. Ils durent considérer la sœur de Chandran, Meena, qui n’avait que trois ans. Un golden retriever est un gros chien, et si les petits enfants jouent un peu, même brutalement, avec lui personne ne risque d'être blessé.


Le petit de huit semaines qu'Appa amena chez lui dimanche matin ne semblait guère être le chien de 70 livres qu'il allait bientôt devenir. Chandran prit le toutou dans ses bras.


« Appa, comment va-t-on l'appeler ? » 


« Et Bhairava? proposa Appa. C’est une forme de Siva qui a un chien comme compagnon. »


Bhairava avait de très beau yeux et était très heureux de connaître Chandran. Sa maman lui avait bien dit qu'un jour il aurait son ami humain, à lui.


Les deux premières semaines avec lui furent consacrées à l'éduquer. Les retrievers sont extrêmement intelligents, il n’a donc pas fallu longtemps pour que Bhairava comprenne qu'il n'avait qu'à se tenir près de la porte arrière quand il avait à sortir.


Cela fait, Chandran décida de l'entraîner a marcher en laisse. C'était assez simple. Il emmena le chien se promener, et chaque fois que le chien s'arrêta, il tira doucement sur la laisse pour le faire venir.

L’objectif était d'enseigner à Bharaiva que c'était Chandran qui se promenait, et que Bhairava devait le suivre. Ce n'était pas Bhairava qui emmenait Chandran en promenade et pouvait s'arrêter quand il le voulait! Cet entraînement permit à Bhairava d’apprendre en douceur qui est-ce qui commandait.


Après quelques semaines d'entraînement en laisse, Chandran se sentait prêt pour la prochaine leçon, la commande « assis ». Toutefois, Bhairava se sentait différemment.


Chandran fit face à son chien en laisse, montra le sol du doigt et commanda : « assis ! »


Bhairava le regardait innocemment, et Chandran appuya sur son arrière-train pour qu’il s'asseye. Mais Bhairava, ne comprenant pas, se leva immédiatement et Chandran dû recommencer.


Appa, qui voyait tout cela, conseilla : « Soit bien gentil avec lui, et patient. S'il te craint, se sera beaucoup plus difficile de le former. »


A contre-cœur, Bhairava s'assit. Chandran lâcha l'arrière-train et, profitant de l’instant avant que le chien ne se relève tout debout, lui dit bien vite : « Bon chien ! » 

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Appa et Chandran avaient étudié diverses méthodes de dresser les chiens. Certains entraînent leurs chiens en les récompensant. D'autres les félicitent simplement. Et d’autres encore les punissent quand ils font mal. Chandran décida que lui, il préférerait en rester aux félicitations. Il ne voulait pas gâter son chien avec trop de friandises ou l'accabler de punitions. C'est ainsi qu'il fut élevé lui-même, et il pensait que les mêmes principes iraient pour Bhairava.


Cet exercice se perpétua, chaque jour dix minutes : « Assis ! » poussant sur le train arrière, puis « bon chien ! » Cette formation n'avait aucun sens pour Bhairava, qui pensait s'asseoir simplement quand il en avait envie et non pas quand quelqu'un le lui ordonnait. Mais enfin, après une vingtaine de séances, Chandran dit : « Assis ! » et Bhairava s'assit de lui- même, sans assistance. Chandran était très content et serra le petit chien dans ses bras. 


À partir de ce moment, les seances devinrent plus aisées. Bhairava, étant intelligent, comprit bientôt ce qu’ « assis » voulait dire. Après tout, si son ami Chandran voulait qu'il s'asseye, il le ferait volontiers. Bien sûr, il ne restait assis que quelques secondes, par conséquent la prochaine commande à lui enseigner devait être « rester ! » 


Voilà qui fut encore plus difficile que lui apprendre « assis ». A chaque fois que Chandran disait à Bhairava de s'asseoir, Bhairava s'asseyait. Puis il disait ensuite : « reste ! » et faisait signe de ne pas bouger comme un gendarme levant la main. Et dès qu’il reculait un peu. Bhairava se levait pour le suivre. Sans mot dire, Chandran le ramenait au point de départ et répétait: « assis ! » puis « rester ! » Et, il le quittait à nouveau. 


Cet exercice se répéta au cours de plusieurs jours. Chandran s’impatientait — Bhairava aussi, qui ne comprenait pas pourquoi il lui était interdit de suivre Chandran —  n'était-ce pas l’objectif de toute la formation en laisse ? 


« Il refuse d’obeir  », se lamenta Chandran auprès d’Appa.


« De la patience, de la patience »,  répondit Appa. « Nous-autres êtres humains on entraîne les chiens depuis des milliers d'années. Persévère et un jour tu y arriveras. »


Effectivement, tout comme cela se produisit au cours des séances précédentes, Bhairava, un jour, obéit soudain à Chandra après que celui-ci lui ait dit « rester ! » et se fût éloigné. Chandran retourna vers lui et dit : « bon chien ! » et lui caressa la tête. Ils continuèrent à répéter l’exercice pendant environ deux semaines encore, jusqu'à ce que Bhairava reste à chaque fois qu'on le lui demande. On ne sait pas par quel principe, toujours est-il que grâce à ces exercices, le garçon et le chien devinrent meilleurs amis. Bhairava, pour le moins, savait ce que Chandran voulait, et cela le rendait plus sûr de lui.


Meena, âgée de trois ans, s’y essaya : « Assieds-toi, Bhairava » , mais ses mots ne réussirent pas.

« Dis simplement « Assis ! » Meena, rien de plus », expliqua Chandran.


« Assis ! » dit Meena, et Bhairava s'assit tout de suite, ce qui surprit et réjouit Meena énormément, et qui produit d'innombrable répétitions si bien qu’Appa dut enfin lui demander d'arrêter jusqu'à ce que la séance de formation soit terminée. Mais Meena ne savait pas comment s’arrêter. Bhairava trouvait cela assez ennuyeux, mais comprit que Meena n'était elle-même qu'un petit toutou du monde humain. Jamais, jamais ne lui a-t-il grogné, même quand elle lui tira l’oreille, ce qui lui fit bien mal.


Après « assis ! » et « rester ! », Bhairava apprit « viens ! », « coucher !  », « donne la patte », « patte en l’air ! », « rouler ! », « va chercher » et même « fais le mort ! » Chandran apprenait à être patient, et c'était très amusant pour le maître et le chien.


Pendant les vacances d'hiver, Abhinav et ses parents rendèrent visite à Chandran et sa famille. Après un déjeuner tranquille et agréable, ils retirѐrent tous à la terrasse. Chandran appella Bhairava, qui vint en bondissant. Il n'était plus un petit toutou. Et même, lorsqu'il se tenait debout, il était aussi grand que Chandran.


Chandran révisa avec lui toutes les ordres qu’il lui avait apprit.


Meena s'approcha de Bhairava alors qu'il était assis. Leurs nez se touchaient presque, car ils étaient à peu près de la même taille. Elle leva la main droite, la tendit vers le chien et dit : « patte en l’air ! » Bhairava leva sa grosse patte droite et toucha doucement la main levée de Meena. Cela la fit rire et tout le monde applaudit. 


Abhinav félicita Chandran : « Bien joué, Chandran. Bhairava est un vrai chien de concours ! » 


Chandran sourit : « C'est grâce à toi et à Appa. Vous m’avez bien expliqué quand il était toutou qu’il n’allait pas apprendre tout de suite. Il faudrait y travailler longtemps et avec gentillesse. À présent, non seulement ai-je formé mon chien, j’ai appris en même temps à être patient. Toute est possible avec volonté et patience ! »


Bhairava savait déjà comment être chien - sa mère le lui avait appris. Mais quant à toute cette formation et cette patience, l’essentiel sera toujours qu’il était simplement content de passer des bon moments avec Chandran - humain bienheureux, chien bienheureux. 

Dix contes sur la maîtrise de soi

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